Du haut de ses 22 ans et de son mètre cinquante et un, c’est une véritable leçon de courage et de ténacité que nous donne Coralie Delmarre. Difficile de croire, lorsqu’on regarde son visage juvénile et ses grands yeux verts qui lui donnent l’air d’un personnage de manga, qu’elle exerce la profession de thanatopracteur… C’est pourtant bien le cas, et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce thanatopracteur inspire le respect.
Coralie Delmarre. |
En effet, impossible de ne pas remarquer sa démarche particulière, qui lui vaut le surnom affectueux de "la boiteuse" parmi ses camarades de promotion, ce qui la fait sourire. C’est à l’âge de quatre ans, après une deuxième varicelle, que Coralie fait une encéphalite et frôle la mort. Après deux mois passés au CHU de Besançon où elle subit quantité d’examens, de ponctions et d’IRM "tout ce qui touche au cerveau", précise-t-elle, c’est le début de longues années de rééducation avec un kiné, une orthophoniste et une psychomotricienne : "Je ne sais plus combien…", ajoute-t-elle dans un soupir.
Tout ceci n’empêche pas Coralie de suivre une scolarité normale et d’obtenir un bac S spécialité SVT : "À 17 ans, j’ai dû subir une opération des tendons de la jambe droite, ce qui m’a empêchée de terminer ma première S, je l’ai donc faite en même temps que la terminale." Après avoir hésité à se diriger vers la médecine légale, elle intègre finalement le centre de formation Thanatopraxie Art et Technique, à Belleherbe, dans la foulée : "J’ai eu envie de devenir thanato parce que le monde funéraire m’intéressait."
À l’issue de sa formation théorique, elle réussit le concours haut la main et rentre en stage pratique au sein de La Belfortaine de Thanatopraxie. Confrontée à la dure réalité du métier et à un maître de stage qui ne lui mâche pas le travail et ne lui épargne rien : "J’ai dû être plus dure avec elle qu’avec les autres, il fallait qu’elle réussisse à s’en sortir seule, sans quoi elle n’aurait jamais pu exercer." Coralie ne baisse pas les bras. Après avoir appris les méthodes "belfortaines", comme la double injection par gravité, elle part en Haute-Savoie pour y découvrir la pression avec Christelle Ory : "J’ai été très contente que Christelle m’accueille pendant ma formation pratique et je lui en suis très reconnaissante."
Élève studieuse, stagiaire modèle
C’est encore brillamment que Coralie obtient son diplôme au terme de son année de pratique, provoquant même des réflexions admiratives de ses examinateurs en optant pour la gravité et en extériorisant deux artères. Encouragée et épaulée par son entourage professionnel, elle décide alors de s’installer à son propre compte en 2015, et crée DC Thanatopraxie, proposant ses services sur le Territoire de Belfort et les départements limitrophes.
Reprenant à son compte la devise de son maître de stage, "tout problème est assorti d’une solution", elle balaie les obstacles à grand renfort d’imagination, en utilisant par exemple un bocal mixte pression/gravité, qui lui permet de s’adapter à ses conditions de travail et à l’accessibilité des équipements. Lorsque je l’interroge sur sa méthodologie, toujours modeste, elle répond : "Je n’ai pas grand-chose à dire, sauf que je continue d’apprendre encore chaque jour, et que c’est précisément ça qui est intéressant, en plus du sentiment de se sentir utile."
Dans l’avenir, qui s’annonce prometteur pour elle, Coralie envisage de suivre une formation de restauration faciale : "J’aimerais beaucoup faire celle de Michel Guenanten dès que j’en aurai l’opportunité."
Si la thanatopraxie est une de ses passions, ce n’est pas la seule
Coralie s’intéresse énormément à la culture manga et se rend à la Japan Expo quand elle le peut. On a également pu l’admirer en 2014 à Funexpo, en train de mouler la célèbre main de l'écrivain Guillaume Bailly, qui était ensuite mise en jeu pour un concours. On peut aussi la croiser à l’occasion autour des circuits de mobylettes, accompagnée de son chien Motor. C’est bien sûr à Coralie que je laisse le mot de la fin : "Je veux juste dire que je suis heureuse d’être thanato et d’avoir choisi cette voie." Tout est dit.
Claire Sarazin
Thanatopracteur et formatrice en thanatopraxie
Résonance n°124 - Octobre 2016
Suivez-nous sur les réseaux sociaux :